La préoccupation qui prévaut lors d’une transfusion sanguine est la protection de la santé du receveur qui souvent est dans une position de vulnérabilité et de non choix par rapport au don qu’il reçoit. Le niveau de sécurité du don de sang et la confiance que la population accorde à la chaîne de transfusion en Belgique doivent absolument être conservées.

Plusieurs catégories de donneurs sont exclues à vie du don à cause par exemple, d’un risque plus élevé de transmission d’infections graves, de la présence de certaines maladies ou parce qu’ils ont bénéficié d’une xénogreffe. D’autres donneurs sont ajournés de manière temporaire, par exemple après une endoscopie, un tatouage ou parce qu’ils ont un nouveau partenaire sexuel. Ce refus peut générer un sentiment de discrimination, comme c’est le cas depuis plusieurs années pour certains hommes ayant des relations sexuelles avec un autre homme (HSH), qu’ils soient homosexuels ou pas.

Néanmoins, le Conseil Supérieur de la Santé (CSS) confirme que puisque le don de sang est un acte volontaire altruiste et non un « droit au don de sang », une exclusion (même permanente) de certains donneurs ne peut pas être assimilée à une entrave illégale à leur volonté de donner du sang. Le droit essentiel et absolu du receveur à la protection de sa santé a toujours priorité sur la volonté des personnes de donner leur sang.

Confrontée à des demandes pressantes concernant le don de sang, la Ministre de la santé a demandé un avis circonstancié au CSS dont l’attention s’est tout d’abord portée sur les HSH. D’autres comportements à risques et certains critères d’exclusion permanente ont fait et feront également l’objet d’une nécessaire réévaluation scientifique.

Epidémiologie et voies de transmission des maladies infectieuses graves

Le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) causant le SIDA est principalement transmissible par voie sexuelle et sanguine. L’infection peut conduire à une maladie grave, nécessitant un traitement lourd. L’évaluation de l’ensemble des études scientifiques et épidémiologiques a confirmé que pour les HSH, la propagation des maladies infectieuses est supérieure à celle de la population non-HSH. En ce qui concerne le VIH, le nombre de nouveaux diagnostics chez les HSH n’a cessé d’augmenter jusqu’en 2013.

C’est ainsi qu’un seul rapport sexuel entre hommes comporte un risque de transmission du VIH qui équivaut au risque qu’encourt un homme hétérosexuel lors de rapports avec 90 partenaires féminines différentes. En s’appuyant sur les données des dix dernières années, le CSS a également estimé que 71 % des donneurs masculins, diagnostiqués positifs pour le VIH au cours d’un don de sang en Belgique, ont eu un rapport sexuel avec un autre homme alors que ceci devrait être impossible au vu des critères permettant de se qualifier pour un don.

Eviter la transmission des maladies lors du don de sang

Les tests de dépistage et les techniques d’inactivation des bactéries et virus dans le sang se sont nettement améliorés au cours de ces dernières années. Leur combinaison permet maintenant de réduire, voire de supprimer dans beaucoup de cas, la transmission d’une maladie infectieuse. Néanmoins, en raison du fait que les techniques d’inactivation ne peuvent s’appliquer à tous les composants sanguins et à tous les agents infectieux, et parce que les techniques de détection sont insuffisantes au stade précoce des infections, un faible risque de contamination persiste toujours lors des dons.

Tous les risques ne pouvant pas actuellement être supprimés par le dépistage et les techniques de réduction des pathogènes, l’exclusion des donneurs à risque élevé reste un élément essentiel pour la protection des receveurs. Celle-ci peut être permanente ou, quand le contexte le permet, temporaire. Le respect scrupuleux des critères d’éligibilité au don de sang reste une étape fondamentale du processus de protection de la santé du receveur; le respect de ces critères est évalué lors de l’entretien médical à chaque don.

Une évolution est-elle possible en Belgique pour les HSH ?

Le CSS a systématiquement évalué de nombreuses options techniques ou pratiques. Les différents scenarii ont chacun des niveaux de preuves scientifiques, des implications budgétaires, une complexité de mise en œuvre ou d’acceptabilité sociétale différents. En l’état actuel des connaissances, en tenant compte du contexte épidémiologique et des techniques de dépistage et de réduction des agents pathogènes appliquées en Belgique, le CSS recommande que les stratégies qui permettent d’assurer un niveau très élevé de protection de la santé des receveurs soient les seules acceptables pour procéder à un changement de la règle d’exclusion permanente.

Pour les options scientifiquement établies (telles que la rétention du plasma viro-inactivé, la viro-inactivation par une méthode validée, l’ajournement de 12 mois, la sécurisation du plasma pour fractionnement), il serait possible de recourir à une ou des mesures moins contraignantes que l’exclusion permanente. Certaines options nécessitent des recherches complémentaires (p.ex. sur l’efficacité des méthodes de réduction des pathogènes pour les plaquettes). Les hommes n'ayant plus eu des rapports sexuels avec des hommes depuis plusieurs mois ou années ont déjà été admis comme donneurs de sang dans de nombreux pays. D’un point de vue des risques infectieux, le CSS estime que la recommandation d’un passage à un ajournement de 12 mois est envisageable. Dans le futur, d’autres mesures pourraient devenir possibles en fonction des résultats de la surveillance des risques infectieux, des progrès de la science ou des techniques sanitaires et des moyens budgétaires alloués pour préserver la santé des receveurs.

Ne pas lever complètement le critère relatif aux rapports sexuels entre hommes

Il est important que la levée de toute exclusion relative aux HSH en Espagne et en Italie a montré un nombre croissant de dons dépistés VIH positifs. Cette constatation plaide contre l’adoption d’une telle approche en Belgique et motive la position actuelle du Conseil.

Un don de sang responsable et acceptable par tous

Dans le contexte décrit, toute modification nécessite et nécessitera une consultation approfondie et un ralliement par tous les acteurs de la chaîne de transfusion, en ce compris les receveurs.

Le CSS recommande la mise en place d’actions pouvant améliorer le niveau de prise de conscience de leur responsabilité sociale chez les personnes souhaitant matérialiser leur altruisme par un don de sang.

 

L’avis, dans son intégralité, (n°9291) se trouve sur le site internet du Conseil Supérieur de la Santé: http://www.health.belgium.be/fr/avis-9291-don-de-sang-par-les-hsh